Le 18 décembre 1977, le stade du 28 septembre, dans un de ses grands jours, le plus historique sans doute est « plein comme un œuf » pour reprendre la célèbre formule de feu doyen Pathé Diallo.
Après plus d’une dizaine de minutes de jeu, le libéro libéré, Chérif Souleymane, plus que jamais impérial, annihile une dangereuse offensive du Hearts Of Oak au milieu du terrain, intercepte le ballon, le contrôle et lance son latéral, le très athlétique Moussa Camara Suller qui le sauve in extremis, sur le côté droit, de la sortie pour les 6,5 mètres en l’envoyant lumineusement sur la tête de son avant centre qui, extraordinairement flexible, saute plus haut que ses gardes corps Ghanéens, le catapulte au fond des filets et ouvre le score pour le Hafia FC en finale retour de la Coupe d’Afrique des Clubs Champions, déjà victorieux (0 – 1) à l’aller à Accra grâce à l’allier droit feu Amara Touré Pele, le dauphin de l’ancien Capitaine Ibrahima Sory Keïta Petit Sory. C’était l’extase partout en Guinée.
L’auteur de ce geste de grand attaquant ouvrant la voix du premier triplé de l’histoire du Football Africain au club phare Guinéen, faisant exulter le stade du 28 septembre bouillonnant de monde et les populations Guinéennes qui, de Boke à Yomou, oreilles collées au transistor, (moyen d’écoute privilégié à l’époque des grands événements), ont suivi, comme si elles étaient présentes sur les lieux, la narration de l’action fidèlement rapportée par la voix d’or de Gaoussou Diaby sur les antennes de la Voix de la Révolution, n’était autre que Seydouba Bangoura, arraché à notre affection ce mardi 17 septembre 2024.
À Fafaya où j’ai suivi le match au milieu d’un public de supporters fanatisés et où le bureau fédéral du parti Etat a assignés, comme dans tous les arrondissements de Koubia nouvellement érigée en région administrative, des marabouts à la lecture du Livre Saint durant les 90 minutes, impossible de décrire la joyeuse folie qui s’est emparée des populations dans la rue avec des bénédictions pour l’équipe et l’heureux buteur comme si l’arbitre avait soufflé le coup de sifflet final.
Assurément, c’est une gloire, mieux un des héros du Football Guinéen qui s’en va.
J’ai été particulièrement foudroyé quand j’ai appris par un coup de fil de l’un de ses illustres anciens coéquipiers des grands moments du Football Guinéen, l’ancien international latéral gauche, Djibril Diarra Becken, la triste nouvelle.
C’est en 75 – 76 que son ami, mon frère feu Ben Camara me présente son camarade de classe Seydouba Sylla qui n’était pas encore joueur du Hafia FC dans les environs du Palais des sports du stade du 28 septembre. Aussi, j’étais loin d’imaginer que l’attaquant de pointe de Kaloum Star était un demi frère de mon ami d’enfance de Fria Ansou Bangoura et que, par leur amitié Aboubacar Bruno Bangoura et lui avec mon frère Cheick Fantamady Conde dans ces années 70, 80, 90, 2000 ainsi que par la proximité de nos locaux dans les années 90 – 2000, que nous serions proches au point de devenir un de ses interlocuteurs privilégiés sur la situation de turbulence politique de la Guinée qui préoccupait beaucoup son rêve d’un pays émergeant.
En effet, l’ancien international, premier buteur de la conquête définitive par le Hafia FC et la Guinée du trophée Kwame Nkrumah, l’ancien de Kaloum Star, du FC 105 de Libreville, le buteur que le Président de l’Africa Sports, Simplice Zinsou a regretté de n’avoir pas pu recruter dans son club en 1983, l’attaquant qui a fortement impressionné le grand défenseur Zaïrois, Lobilo Boba du Vita club et des Leopards au point d’en faire son intime ami et de faire de la Guinée sa seconde patrie était un généreux compatriote mais aussi et surtout un vrai patriote.
Humain, sociable et généreux, mon frère Seydouba Bangoura l’était. À la faveur d’une simple rencontre à Bruxelles où j’étais sur invitation de mon ami Abass Pablo Bangoura en juillet 2006 pendant la Coupe du monde Italienne, Seydouba Bangoura m’offre sans aucun protocole un véhicule et se met à ma disposition tout au long de mon séjour dans la capitale Belge. Sans bruits ni tambours, il était ainsi avec les Guinéens à Conakry ou de passage où il possède depuis une grande propriété.
Patriote amoureux de la Guinée, j’ai toujours eu l’occasion de le constater chez l’enfant de Fria à chaque fois que nous échangions dans son bureau où il me conviait souvent quand nos sièges de S Transit et de La Nouvelle Tribune étaient voisins sur la 6ème avenue de Sandervalia.
Proche du Président Lansana Conté, il était d’une grande lucidité dans l’analyse des actes de ce dernier.
Il ne cachait pas ses inquiétudes par rapport à certaines dérives du pouvoir au moment surtout de la maladie du Président.
Le sens managerial et le patriotisme du patron de société, activité dans laquelle il s’est épanoui davantage après une carrière de Footballeur plutôt fructueuse à l’époque dans son cas, l’ont éloigné du sectarisme, du communautarisme en privilégiant le critère de compétence, de loyauté et de sincérité dans ses amitiés et collaborations professionnelles avec des Guinéens de toutes origines. Cet esprit explique en grande partie la prospérité de S Transit.
Son combat pour la société minière lancée avec l’ancien ministre des mines, Facinet Fofana était celui d’un Guinéen qui voulait créer et partager la richesse avec ses compatriotes. J’étais très heureux de le revoir encore sur pied et très combatif après l’épreuve sanitaire qu’il a traversée dans les années 2010 à Bruxelles où il a subi une intervention chirurgicale générale pour le moins compliquée.
Au finish, on peut retenir que sportif comme chef d’entreprises, Seydouba Bangoura a servi la Guinée et a été au mieux de ses possibilités utile aux Guinéens.
En cette période de deuil, j’ai une pensée émue pour son épouse, ses enfants, ses frères Abass Bangoura Pablo, Mohamed Aziz Sylla, ses coéquipiers du Syli National et du Hafia FC et rends hommage à la memoire d’un vrai Patriote.
VEUILLE ALLAH, NOTRE CRÉATEUR, l’accepter dans son éternel Paradis. Amen